Vocation et avenir de l'Orthodoxie en Occident


Raymond rizk


Je ne sais pourquoi, trois situations vécues à différentes périodes de ma vie s'éveillent soudainement en moi. Je voudrais vous en faire part.

Tout d’abord cette pensée contenue dans contenue dans un "florilège" que m'avait adressé un vieux moine catholique français, peu de temps avant sa mort, il y a de cela quelques mois : "Sors de l'avenir, tu ne sais pas le regarder. Tes yeux n'y voient que des croix et il ne renferme que de l'amour".

Puis cette phrase qu'avait balbutiée avec beaucoup de douceur un vieil évêque orthodoxe roumain ou peut-être bulgare, il y a près de trente ans, en réponse à d'âpres critiques que j'avais formulées devant lui - à une époque où fier d'avoir redécouvert mon Orthodoxie, je me définissais, comme le font souvent les néophytes, en m'opposant - sur ce que j'avais alors appelé la "torpeur" des Eglises orthodoxes d'Europe de l'Est. Et le vieil évêque, dont les yeux réflé taient toute la souffrance du monde, m'avait dit: "C'est aux jeunes orthodoxes, auxquels il est donné de vivre dans des pays où aucune force extérieure n'entrave leur liberté d'action, de se ressaisir dans la foi pour que leurs Eglises sortent de leur propre torpeur et deviennent les témoins de la véritable Orthodoxie. Quant à nous, ajoutait-il, ne nous oubliez pas dans vos prières. Notre témoi­gnage est peut-être d'un autre genre".

Enfin le cri d'une amie protestante américaine, rencontrée il y a bien long­ temps lors d'une assemblée de la Fédération universelle des associations chrétien­nes d'étudiants (FUACE), à la suite d'une longue discussion théologique où les orthodoxes avaient essayé d'exposer leur vision de la liturgie comme source et prémice de toute vie communautaire. Elle nous disait: "Tout cela est très beau et semble répondre à beaucoup de nos attentes. Vous dites que c'est là la vision de l'Eglise primitive, je veux bien vous croire, mais nous est­ il possible de l'incarner de nos jours? Et vous qui en parlez si bien, dites­ moi s'il vous plait, où je pourrais aujourd'hui la vivre ?".

Il me semble qu'un début de réponse à la grande interrogation qui nous réunit "Etre orthodoxe ici et maintenant: quelle vocation, quelle espérance ?", réside dans ces trois phrases car elles éclairent - chacune à sa façon -les pièges dans lesquels nous tombons souvent dans notre monde orthodoxe, et  laissent entrevoir les voies du renouveau.                          

Hommes de peu de foi: notre torpeur

La première phrase "l'avenir n'est pas plein de croix mais d'amour", rappelle la tentation de l'abattement (citée, après l'oisiveté, en tête de liste par saint Isaac le Syrien dans sa prière du repentir) qui nous prend fréquemment devant l'urgence, la difficulté et l'immensité de la tâche d'être chrétien, et qui nous éparpille dans une mauvaise curiosité, avide des choses de ce monde, nous faisant oublier notre foi en l'efficacité de Dieu, le véritable protagoniste de l'œuvre du renouveau et qui nous appelle sans cesse a y partici­per en tant que co-acteurs.

Or le semeur a à semer, il n'a pas à connaitre le temps - ni l'étendue - de la moisson, mais il se doit de vivre dans la conviction et l'espérance  que le Dieu de la moisson est ressuscité et qu'il est source éternelle de résurrec­tion. L'avenir est le fruit fructifié par l'Esprit de notre engagement d'aujour­d'hui à être et rester fidèles, mettant toute notre confiance en Celui qui a vaincu le monde.

La foi, la vraie, pas celle dont on parle et dont on se prévaut, mais celle qui agit de l'intérieur dans un mouvement d'infinie confiance dans la sagesse de Dieu et dans un appel à nous "abêtir" aux yeux du monde, cette foi peut toujours "déplacer des montagnes" car, somme toute, les miracles sont à la portée - et à la mesure - de l'homme "christophore", de celui qui "porte le Christ" en son cœur.

Or il nous faut, je crois, avouer que nous manquons de cette foi là, et que  des paroles de l'Evangile comme "Demandez le Royaume  de Dieu et sa justice et tout le reste vous sera donné par surcroit...", ou bien "Ne vous souciez pas..." de telle ou telle autre chose, qui sont autant d'invites à sortir de nous-mêmes, de notre suffisance, de notre embourgeoisement, de la sécurité trouble de l'argent , du pouvoir, à la limite de la raison, et autant d'appels à nous détacher de tout pour suivre Jésus, il nous faut admettre que ces paroles d'Evangile nous semblent souvent comme des sortes d'hyperboles des surenchères verbales, des commandements "contre-nature", car nous oublions que la vraie nature, que les vrais critères ne devraient plus être pour nous, après la Résur­rection, ceux de notre nature cassée, déchirée,  mais ceux du Dieu-Homme, qui a assumé cette nature et l'a fait asseoir dans la gloire à la droite du Père. 

La torpeur de nos Eglises  

La deuxième phrase, celle du vieil évêque orthodoxe d'Europe de l'Est, nous rappelle la "torpeur" qui assaille nos Eglises, indépendamment d'ailleurs de leur degré de liberté, et la nécessité pour tous les membres du peuple de Dieu - en insistant peut-être davantage sur les jeunes - de se considérer en commun responsables de cette torpeur et de s'atteler à l'œuvre du renouveau. Cela suppose l'abandon du rôle si confortable de spectateur au doigt accusateur - tellement fréquent dans nos milieux orthodoxes -, qui pourfend de ses critiques les divers "ils" dont il affuble les autres - qu'ils soient clercs ou laïcs de "l'autre bord" - pour assumer le stade du "nous" qui devrait être le seul pronom chrétien                                .

Mais avant d'aller plus loin il serait bon de nous demander, nous qui savons que "devant le Seigneur, il n'y a ni jeunes ni vieux mais ce que la Parole de Dieu crée ou ne crée pas" (métropolite Georges Khodr), pourquoi cette insistance sur les jeunes au sein du Peuple de Dieu                  .

Tout d'abord parce qu'ils en sont membres de plein droit et qu'on ne les y entend pas souvent, ce qui crée parfois un certain déséquilibre dans la vision et l'action pastorales plus particulièrement réservées aux adultes. Or s'il l’est vrai que le rôle des adultes est de conserver vivante la tradition qui leur a été transmise et de l'enrichir par l'expérience des saints que Dieu suscite parmi eux au terme d'une vie passée à Le servir, il n'en reste cependant pas moins qu'ils ont parfois trop tendance à s 'attacher aux statu quo sécuri­sants et qu'un excès de prudence les amène à ne pas distinguer assez entre les divers éléments de cette tradition qu'il veulent à juste titre préserver, pour pouvoir en élaguer les branches mortes                               .

Les jeunes, par contre, ont eux tendance, de par leur tempérament, à remettre en question tout ce qui leur est donné. Pour cela, un de leurs rôles dans l'Eglise dans la mesure où ils veulent vraiment jouer le jeu, c'est-à-dire se lancer de plein cœur, comme eux seuls savent le faire, dans l'aventure de la sainteté, c'est justement de poser des questions à l'Eglise, de l'inter­peller, de la "gêner" et par là et par leur engagement de l'aider à retrouver son éternelle jeunesse.

De plus, les jeunes sont les mieux placés au sein du peuple de Dieu pour sentir dans leur chair la souffrance et les angoisses du monde, et pour compren­dre les formes nouvelles dans lesquelles il ne cesse d'évoluer. De ce fait ils sont appelés à être, comme le dit le métropolite Georges Khodr, "les intermédiaires entre l'Eglise et la modernité". C'est à eux plus particulièrement de suggérer et d'expérimenter le langage et les gestes nouveaux à adopter par l'Eglise pour être mieux comprise dans le monde d'aujourd'hui.

En cela, les jeunes sont les intermédiaires de toute l'Eglise. Il ne s'agit pas pour eux de se mettre en vedette, ni de se croire privilégiés. Il faut qu'ils restent au plus profond du monde ceux que la vérité interpelle et qui la suivent. Et leur fonction dans l'Eglise est justement d'être sans honte et sans peur - "que nul ne méprise ton jeune âge" (1 Tim. 4,12) - l'écho de ces interpellations afin que l'Eglise devienne plus elle-même et remplace les scories que sa Tradition vivante a charriées au long de sa pérégrination terrestre, par les humbles pépites que l'Esprit met entre les mains de chaque nouvelle génération quand elle se remplit de lui.

Mais la phrase du vieil évêque orthodoxe nous fait aussi réaliser, qu'au-delà  de cette responsabilité commune à tous les orthodoxes de faire sortir leur Eglise locale de sa torpeur, les orthodoxes vivant en Occident - et là aussi en particulier les jeunes qui sans renier les richesses de leur patrimoine d'origine sont beaucoup plus que leurs parents susceptibles s'ils dépassent les crises d'identité d'être sensibles à celles de l'Occident - ont - une respon­sabilité plus vaste envers l'Orthodoxie entière du fait du contexte tant ecclésial que socio-politique dans lequel ils vivent. Car s'il est vrai qu'ils y sont confrontés à des problèmes nouveaux, non toujours considérés par les Eglises­ mères, ils sont par contre censés être plus libres vis-à-vis des contingences politiques et sociologiques qui paralysent ou retardent l'action de la plupart des Eglises orthodoxes traditionnelles : pour certaines par des restrictions de liberté et des persécutions, pour d'autres par des confusions entre l'Eglise et l'ethnie, pour toutes par les tentations nationalistes et phylétismes et la somnolence des situations établies.

Le fait que seuls les croyants fréquentent en général ici nos églises, le fait que nous formons le plus souvent de petites communautés en situation de diaspora donc théoriquement plus libres du poids de la terre et de l'histoire, devrait nous rapprocher de la spiritualité des premiers chrétiens qui selon l'épitre à Diognète {2e siècle) "vivent dans leurs pays comme des étrangers, et tout pays étranger est leur patrie et toute patrie leur est étrangère", et nous permettre plus de recul pour faire les mises au point nécessaires, les distinctions et les réformes qui s'imposent et tenter certaines expériences de vie en communautés eucharistiques vraies, pour notre propre édification mais aussi au nom et pour le compte de l'Orthodoxie universelle.

Ce qu'on attend de nous         

La troisième phrase - la vision orthodoxe est attirante, mais où et comment la vivre ? nous rappelle que parfois, peut-être souvent nous avons tendance face à l'Occident à "faire" de la "belle" théologie sans essayer d'en vivre.

Cela pose certes le problème des responsabilités énormes qui sont les nôtres  pour traduire dans un langage accessible les trésors de l'Eglise primitive dont nous sommes les gérants, responsabilités que les premières générations de la diaspora orthodoxe en Occident ont d'ailleurs si bien ressenties. Et c'est un lieu commun de dire que l'Occident chrétien leur est redevable d'un apport qui s'est avéré précieux dans les réveils patristique et liturgique de ce siècle.

Mais il me semble qu'aujourd'hui l'Occident a beaucoup plus besoin de chrétiens qui soient bien plus des témoins et des vivants, des "théologiens à la manière des pêcheurs-apôtres" (Grégoire de Nysse) que des professeurs d'histoire des religions ou d'archéologie théologique... Il a besoin - comme l'Orient d'ailleurs, de s'entendre dire: "Viens et vois". Il s'agit d'expérimenter nos dires théologiques ici et maintenant, dans le réel de nos paroisses, humblement, sans triomphalisme, dans une ouverture attentive aux gémissements que l'Esprit nous laissera si nous restons en éveil - capter et peut-être transmettre en paroles de vie.

Notre vocation quelques jalons 

Je ne suis en Occident que depuis peu - et encore en visiteur - et je ne peux donc prétendre vous dire comment devrait s'y articuler la vocation des orthodoxes aujourd'hui. J'oserais cependant suggérer à votre réflexion quelques jalons qui me semblent devoir orienter notre témoignage.

1. Etre conscients de notre identité orthodoxe           

Cela veut dire que nous devons réaliser que nous sommes chrétiens avant que d'être étudiants, ouvriers ou fonctionnaires; chrétiens, c'est-à-dire: servi- teurs, frères adoptifs et imitateurs du Christ qui est, avec Son Père et Son Esprit très saint, le but ultime de notre vie et son sens. Ainsi le Christ et son service ne peuvent être pour nous un passe-temps, un bouche-trou, une évasion, un intérêt à côté d'autres, l'occupation d'un dimanche matin…, mais ce par quoi, ou plutôt Celui par qui tout prend sa véritable signification. Etre conscients de notre identité veut dire aussi que nous devons réaliser que nous sommes des chrétiens orthodoxes - avant que d'être Grecs, Français, Russes ou Arabes, notre véritable patrie - la seule où nous ne sommes pas des étrangers étant l'Eglise du Christ dans laquelle et par laquelle nous naissons à la vie éternelle.

Cette prise de conscience de notre véritable identité ne refuse certes pas les identités autres, mais elle devrait les illuminer de l'intérieur, nous permettant de ne pas sombrer dans les "ismes" de tous genres (nationalisme, phylétisme, chauvinisme, racisme, etc…) qu'elles ont tendance à générer quand elles sont laissées à elles-mêmes                                          .

Pour connaitre et vivre notre Orthodoxie, il n'y a d'autre voie que celle qui "a été livrée une fois aux Saints", et expérimentée par des générations de· nos frères dans la foi. Il nous faut beaucoup d'humilité, de confiance, mais aussi d'audace pour accepter de suivre une voie qui semble à beaucoup, selon les critères prévalant de nos jours "désuète", "dépassée", pour ne pas dire "obscurantiste". Il nous faut oser faire ce défi à nous-mêmes - et à ce monde - et vouloir vraiment devenir chrétiens, car on ne l'est jamais assez, on le devient en permanence, encouragés en cela par les traces lumineuses de ceux qui nous ont précédé sur les voies de la sainteté et qui sont encore aujourd'hui nos compagnons de route.

Sans cette volonté, tout attachement à l'Orthodoxie est futile, à la limite c'est un contre-témoignage. Est témoin celui qui a fait silence pour entendre la Parole à transmettre, s'en est rempli, en a vécu et s'est fait transparent pour qu'elle illumine à travers lui.

Devenir orthodoxe, aujourd'hui comme hier, passe donc forcément par:

a) La pénitence et l'acquisition de "l'Esprit du Christ" par la prière, la fréquentation assidue des Ecritures et des Pères - tant ceux d'antan que ceux qui aujourd'hui nous aident dans notre cheminement spirituel - et par la rigueur de notre style de vie, car "nul n'est digne d'aller vers toi, ô roi de gloire, s'il est lié - comme le dit notre Liturgie - par les passions et les voluptés charnelles".

b) La participation à la vie de la communauté eucharistique comme ressour- cement, enracinement dans le Christ et son Eglise, mais aussi réalisation et prise de conscience de l'unité et la coresponsabilité de tous les membres du Peuple de Dieu, apprentissage d'amour fraternel, de mise en commun et de service, et par !'expérience de vie continuelle dans la sainte présence de Dieu, avant-goût d'éternité.

c) Le témoignage et le service car l'amour, source et contenu de toute diaconie, "naît de la prière" (St Isaac le Syrien) et "la vie et la mort dépendent de notre prochain... et si nous scandalisons notre frère nous péchons contre le Christ" (St Antoine le Grand). Il s'agit pour nous d'être les témoins de la résur- rection expérimentée par nous non pas uniquement la nuit de Pâques, mais aussi - surtout à travers le déroulement de cette vie dans l'Eglise, que nous venons de mentionner et qui est faite de morts-résurrections continuelles 

Témoins de la résurrection, non seulement par la parole, mais surtout par le fait d'être devenus "un groupe d'hommes tellement ressuscités que la Résurrection (n'est) plus seulement une affirmation des Ecritures mais qu'elle est lisible dans (leur) comportement communautaire" (métropolite Georges Khodr). Nous reviendrons plus loin sur les principales harmoniques de notre témoignage "résurrectionnel". Contentons-nous maintenant de dire qu'il se doit de toucher toutes les préoccupations de l'homme, sans peur, ni fausse honte, ni compro­mission.

C'est là la première facette de notre vocation d'orthodoxes en Occident: prendre conscience de notre Orthodoxie en la vivant et en l'incarnant dans un comportement de service et de témoignage. Devenir somme toute plutôt que des "liturgistes", des hommes ouverts, "au visage et au sourire liturgiques" (P. Evdokimov), des hommes-louange, des hommes-appel.  

2. Amener notre Eglise à briser les carcans et se mettre à l'écoute de l'Esprit

C'est là la deuxième facette de notre vocation: amener l'Eglise orthodoxe à briser les carcans divers - anciens et modernes - dans lesquels elle se laisse enfermer et à se mettre à l'écoute de !'Esprit pour déchiffrer les signes des temps, prêter une oreille vigilante aux cris des hommes et sentir l'urgence du renouveau à tous les niveaux de sa vie ecclésiale. Je citerai ceux où cette urgence de renouveau me semble être la plus criante.   

a) Hâter l'avènement de communautés eucharistiques vivantes, par un renouveau liturgique en profondeur pour retrouver au-delà des traditions diverses qu'il faut savoir interpeller, le véritable sens de la liturgie comme œuvre commune. Et cela implique un renouveau des textes et des pratiques (langue liturgique à la portée de tous, lecture des prières "secrètes" à haute voix, préparation commune des oblats et de certaines litanies, communion fréquente, etc…), un assainissement des relations entre tous les membres du Peuple de Dieu (dans le sens d'une mise en pratique de la coresponsabilité, dans le respect des charismes de chacun, des clercs et des laïcs dans le gouvernement et le service de l'Eglise), et surtout une célébration de plus en plus réelle de la "liturgie après la Liturgie" et du "sacrement du frère" par le partage et la mise en commun.

Former ces communautés, ou tous les orthodoxes d'un même lieu, sans distinc­tion d'âge, d'origine ou de rang social, se retrouvent frères dans la louange et le témoignage, est un service que notre génération de la diaspora se doit de rendre à l'Orthodoxie Et je voudrais témoigner qu'il m'a été donné de connaitre ici et là en France, quelques paroisses qui sont conscientes de cette responsabilité et tentent d'y répondre. Mais comme il y a urgence, notre vocation est d'étendre ces expériences et de forcer "en toute humilité et bonté" les réticences et les hésitations des uns et des autres - et leur faire comprendre avec la douceur mais avec l'audace de ceux qui savent qu'ils ont été "rachetés à grand prix" que souvent par leur opposition ce sont les "Eglises" orthodoxes qu'inconsciem­ment ils défendent contre 1'Orthodoxie!.                  

b) Encourager ce qu'il est convenu d'appeler les "vocations", en prenant cependant bien soin de donner à ce terme le sens qui est le sien dans la tradi-­ tion orthodoxe. En effet la vocation de chaque baptisé lui est signifiée à sa chrismation quand il est oint du sceau du Saint-Esprit et "consacré" à Dieu. Sa vocation est alors de réaliser cette consécration dans le service auquel Dieu et son Peuple l'appellent selon les charismes qui lui ont été donnés. Des communautés eucharistiques vraies ne peuvent se former et survivre que si elles comptent parmi leurs membres un noyau, un "petit reste", conscient de cette consécration et qui travaille à la réaliser en soi et dans les autres.

Nous avons en Occident un besoin pressant de ces orthodoxes "consacrés" qui soient prêts à répondre "présent" et à être disponibles à servir là où les appelle l'Eglise. Nous avons certes besoin de laïcs pleinement engagés. Mais nous avons encore plus besoin d'évêques, de prêtres et de moines ainsi engagés. Prions pour que les "jeunes" (en esprit) de nos Eglises en Occident ne durcissent pas trop leur cœur                                        .

c) La diaspora creuset de l'unité orthodoxe

Sur le plan intercommunautaire, travailler par tous les moyens à lutter contre l'hérésie des juridictions orthodoxes parallèles. Et d'abord en sensibi­lisant l'ensemble du Peuple de Dieu au fait qu'il y a effectivement aberration et qu'il est nécessaire d'œuvrer - dans l'urgence, les temps sont si courts - à l'établissement d'une Eglise orthodoxe une dans le respect des diversités légi­times.

Il me semble   qu’il existe à ce sujet une certaine lassitude et que nous avons tendance à nous installer dans cette aberration, que nous ne voudrions pas trop en parler pour ménager je ne sais quelles susceptibilités et éviter des situations conflictuelles.

Il s'agit certes de rendre grâces pour les progrès réalisés durant les quelques dernières décennies, rendre grâces pour le Comité inter épiscopal, pour les programmes communs, pour la Fraternité orthodoxe, pour tous ceux qui inlassablement travaillent à éroder le "vieil homme" et donner jour au nouveau. Mais de façon générale, le Peuple de Dieu dans son ensemble est tenu à l'écart. Lui qui a la possibilité de "vérifier et témoigner" (1 Th. 5, 21) et qui est le "défenseur" de la foi, il devrait être interpellé par la gravité de ce problème. Il devrait être invité à démolir ces murs que chacune de nos juridictions semble prendre plaisir à ériger pour défendre je ne sais quelle identité qui souvent chez elle prévaut sur l'identité orthodoxe.

Les suspicions, à la limite parfois les haines, que j'ai eu la souffrance - nouvellement venu - de ressentir entre nous, les jalousies, le refus de l'autre, sont malheureusement encore très présents dans nos milieux.

Saint Basile le Grand, devant une situation multi-juridictionnelle similaire du moins dans ses résultats pratiques - écrivait à ses pairs cette phrase qui semble tellement actuelle : "Il est préférable que nous disparaissions et que les églises vivent dans une mutuelle concorde plutôt que de voir nos puériles et mesquines querelles causer un si grand mal aux peuples de Dieu" (Lettre 204,7). Sommes-nous capables de faire nôtre son cri, et de crier à notre tour au scandale ?                                         

La diaspora est le creuset où les divers peuples orthodoxes doivent apprendre à vivre leur unité d'une façon organique, existentielle. C'est notre chance pour traduire dans le réel ce dont nous ne cessons de parler en théorie. Si nous continuons à ne pas la saisir, il ne faut pas s'attendre à ce que les autres continuent à nous prendre au sérieux.

d) Conscientiser les peuples orthodoxes de la nécessité d'une convocation rapide du "Saint et Grand Concile"   

De même, il est important de faire prendre conscience aux fidèles orthodoxes des problèmes qui entravent la marche historique de l'Eglise orthodoxe sur le plan mondial et de la nécessité de voir se réunir dans un avenir prévisible le Saint et Grand Concile dont on parle depuis si longtemps. Il est évident que des difficultés existent. Mais il est aussi évident qu'elles ne seront pas résolues par des négociations "politiciennes" mais surtout par la fervente prière des humbles et des "petits qui croient" en la toute-puissance de l'Esprit Saint. Encore faut-il les sensibiliser à l'urgence de la convocation de ce Concile, à la nécessité d'étudier les textes que les diverses commissions prépa­ratoires sont en train d'établir, et à y réagir. Un mouvement en ce sens avait vu le jour dans certains milieux orthodoxes, en particulier en France et au Liban, dans les années 1960-70, qui semble avoir perdu du souffle. N'est-il pas de notre vocation, à l'heure où la préparation de ce Concile pourrait commen­cer à se débloquer - avec la récente réunion à Chambésy de la commission précon­ciliaire préparatoire - de le réexaminer et de promouvoir un mouvement de prière et de réflexion dans toutes les Eglises?

e) Parler au nom des orthodoxes qui ne le peuvent pas et etre solidaires avec ceux qui souffrent

Une autre responsabilité que la diaspora orthodoxe me semble devoir de plus en plus assumer consiste à se faire le porte-parole et se sentir solidaires – par la prière, la ^parole et l’aide – de ceux des orthodoxes des Eglises-mères qui souffrent dans leur âme ou dans leur corps.

Je pense plus particulièrement :

- aux orthodoxes persécutés d'Europe de l'Est, surtout ceux d'entre eux qui sont emprisonnés ou internés dans des hôpitaux psychiatriques;
- aux orthodoxes en Turquie, tant grecs qu'arabes antiochiens, soumis aux vexations d'un fanatisme nationaliste et religieux;
- aux orthodoxes arabes de Terre Sainte dont l'émigration systématique pour des raisons politico-économiques risque de vider les lieux saints des temples vivants de l'Esprit pour n'y laisser que les temples de pierre;
- aux orthodoxes de plusieurs pays du Moyen-Orient, en particulier le Liban, dont l’existence, la liberté et la volonté d’être les « témoins de la douceur évangélique » (métropolite Georges Khodr) sont en péril à cause de la montée des intégrismes de tous bords,
- enfin aux orthodoxes éthiopiens qui souffrent de la faim avec tant d'autres dans le continent africain .

C'est par cette solidarité que nous vivrons aussi la "communion des saints". Il est évident que les médias jouent un rôle majeur dans cette entreprise. Pour cela notre vocation d'orthodoxes en Occident, où la liberté d'expression est assurée, est donc de savoir en faire usage, d'encourager les organes de presse existants (en particulier le SOP, mais aussi les programmes de radio et de télévision) d'œuvrer à l'établissement d'un centre de documentation et d'information panorthodoxe.

f) Etre le catalyseur d'une rencontre en profondeur entre l'Orient et l'Occident

Cela ne sera possible que si l'Orthodoxie, pour reprendre l'expression qu'Olivier Clément utilisée dans son livre "Orient-Occident : deux passeurs", à propos de V. Lossky et de P. Evdokimov, "(ne nous enferme pas) mais (nous ouvre) de partout, en tout à l'essentiel" (p. 11).

 Dieu nous a voulus en Occident, non seulement pour rappeler à ceux qui y vivent d'abord par notre vie, mais aussi par la parole - les exigences de l'Eglise primitive et nos racines communes, mais aussi pour comprendre l'Occident chrétien de l'intérieur dans la rencontre fraternelle, afin d'en faire connaitre le meilleur à nos Eglises-mères et aider ainsi à faire tomber les barrières et les blocages psychologiques dont nous sommes tous responsables mais que des chrétiens occidentaux ont malheureusement aidé à renforcer par l'uniatisme, le prosélytisme et l'approche souvent hautaine et agressive qu'ils ont adoptée, quand, au cours de l'histoire, il leur a été donné de vivre en Orient. Nous serons fidèles à notre vocation si nous évitons ces pièges et ces tentations                                     .

Nous devons pratiquer une Orthodoxie ouverte, accueillante. Les temps des ghettos, même spirituels, sont définitivement révolus. Cela ne veut dire à mon sens ni syncrétisme, ni œcuménisme sentimental à la va-vite, ni rassemblement des chrétiens à tout prix dans un esprit de croisade, ni même "hospitalité eucharistique" systématique. Mais une prière commune ardente et continue, explicitement exprimée dans nos services liturgiques habituels et notre prière personnelle pour que Dieu nous aide à dépasser nos divergences dans un respect absolu de Sa vérité.

Un retour commun aux sources de nos traditions particulières lesquelles une fois débarrassées des poussières que le passé et le présent ne cessent d'y accumuler, se découvriront souvent étrangement complémentaires. Un effort commun pour réacquérir les uns et les autres, les uns par l'exemple des autres, un style de vie qui se veut authentiquement évangélique. Enfin une action commune et concertée dans le témoignage en un même lieu et le service des déshérités qui y vivent                                .

Tout cela accompagné et soutenu par une souffrance assumée comme une croix de ne pouvoir encore proclamer notre unité à la face du monde "pour qu'il croie", mais aussi par une volonté de crier sur tous les toits qu'il y a là aussi urgence, que les "murs de la séparation ne vont pas - (ce n'est pas possible) - jusqu'au ciel", et que tous ceux qui ne connaissent pas le Christ ou qui par leurs actes ou leurs dires semblent l'avoir oublié, attendent de nous ensemble - sans même le savoir et certes sans l'admettre, des modèles de convivialité, d'unité et de communion                            .

3. Témoigner de notre espérance dans un monde brisé

Ceci nous amène à aborder la troisième facette de notre vocation d'orthodoxes en Occident : témoigner avec les autres chrétiens, de l'espérance qui nous habite au milieu de notre monde brisé et meurtri, notre témoignage et notre action dans ce domaine devant s'articuler autour des idées-forces suivantes :                              :

a) Pleinement hommes mais des hommes à Christ


Dans une civilisation fondée de plus en plus sur la production et la consommation des biens matériels, écartelée par la violence et les tensions entre les générations et les blocs, grisée par les possibilités dantesques que lui offre la technique, désacralisant à outrance, disloquant les structures familiales et mettant en question toute valeur traditionnelle au nom d'une fallacieuse liberté, coupant l'homme de la terre et engendrant en lui des besoins toujours nouveaux et souvent artificiels qui laissent dans sa bouche un amer goût d'ennui, de solitude, d'apathie et de détresse, une "crise de l'esprit" est en gestation.

 Ce monde-là n’a pas besoin de doctrinaires lançant des anathèmes, ni même d’une « aristocratie de la prière » (Georges Khodr), qui s’armant des prophéties de l’Apocalypse, en arrive à se laver hypocritement les mains de « tout ce qui est dans le monde » (1 Jean 2, 16)…

 Ce monde a encore moins besoin de l’activisme d’un grand nombre qui « célèbrent dans le technicien, le nouveau liturge d’un achèvement de la création sans poser, au-delà de l’éthique le problème du sens spirituel et cosmique de la machine (N. Nissiotis) et de la civilisation qu’elle a engendrée.

Ce monde a surtout besoin d'hommes pleinement humains, c'est-à-dire ouverts aux problèmes de leurs contemporains et les ressentant dans leur chair et dans leur cœur, mais des hommes qui se veulent en même temps, des "hommes à Christ", qui n'ont pas peur dans leur mode de vie fait de rigueur personnelle et de mansuétude pour les autres, de se vouloir différents, qui n'ont pas honte de proclamer que le péché, avant que d'être transgression, est un retard à rendre grâces, et qu'il est vrai que "l'homme n'est grand qu'à genoux" car c'est dans cette posture qu'il se fait le plus proche du Dieu kénotique qui nous aime "d'amour fou" et nous appelle à laver, comme Lui , les pieds des hommes                         .

"On ne répond aux héros de la pseudo-totalité ou de la mort, écrivait il y a plusieurs années Olivier Clément, que par l'appel à une sainteté renouvelée". Et il ajoutait "Seuls les saints savent intérioriser la violence en métamorp­hose... diffuser par l'amour actif ou la simple action de présence la communion qui sape les murs de la séparation et travaille au salut de tous".

Il est certain que les hommes d’aujourd’hui ont besoin que les chrétiens soient aussi « fou » que leur Dieu, car « si le sel s’affadit », il est normal que la vie n’aie plus de saveur et que s’accroisse le goût d’amertume.

Dire aujourd'hui, et le confirmer par une vie rayonnante de joie et de disponibilité, que la prière incessante, cette conscience de vivre continuellement dans la présence de Dieu, que le jeûne, l'ascèse, la chasteté, l'humilité, continuent d’avoir droit de cité et sont des valeurs de vie pour des jeunes du 20e siècle par ailleurs libres de tout complexe, est en soi-même un témoignage.

Dire que le Christ ne nous a pas appelés à la facilite mais dire aussi que Son "joug est doux" car Il n'est pas avare du Consolateur dont "l'acquisition", selon le grand témoin de la sainteté au tournant de ce siècle que fut saint Séraphim de Sarov, est le "but" de notre vie et nous donne cette "paix intérieure" qui, toujours selon lui, sauvera "des multitudes" autour de nous.

Dire aussi que "l'homme" que les chrétiens ont présenté au monde, et qu'ils ont si souvent incarné, n'est pas celui des évangiles et qu'il s'agit aujourd'hui de se débarrasser des dichotomies diverses (esprit-corps, nature-grâce, etc…) pour retrouver les options lumineuses et libératrices de l'anthropologie des Pères, en particulier des Pères orientaux                         .

Retrouver l'habitude heureusement encore vécue en Orient, même non chré- tien, bien que souvent entachée de routine - de mêler Dieu à tous les évènements de la vie de tous les jours, mêmes les plus simples. Des expressions comme "grâce à Dieu", "s'il plait à Dieu", "au nom de Dieu", "que Dieu te vienne en aide", si fréquemment utilisées dans le monde oriental et dans l'Orthodoxie de nos pays d'origine, et qui étonnent et font sourire souvent en Occident, devraient retrouver leur chemin à nos bouches et si elles sont sous-tendues par la prière de Jésus trouver leur écho dans nos cœurs, car par la mémoire continue de Dieu en nous, se fait la sanctification du monde.

b) La religion n'est pas une affaire individuelle

Un deuxième aspect de notre témoignage de chrétiens en Occident - et plus particulièrement en France, est de rappeler que "personne ne "fait son salut" tout seul", et que, contrairement à l'opinion prédominante, la religion n'est pas une affaire individuelle, dont on ne parle guère, par pudeur, ou crise d'identité, je ne sais, mais que la religion est surtout et avant tout une affaire communautaire, car sans exclure les rencontres personnelles (Jésus rencontre Marie-Madeleine seule dans le jardin…), Dieu va toujours à la rencontre d'un peuple réuni et il y fait surgir les vocations et les réalités personnelles dans la communion.

Le témoignage des chrétiens est un témoignage communautaire, d'où l'urgence de la réforme de nos communautés eucharistiques car il est encore trop courant que la vie de certaines de nos paroisses où, comme l'écrit Olivier Clément, "le caractère religieux s'évapore, où l'aspect païen reparait et s'affirme, où le pittoresque et un folklore religieux se sont substitués au spirituel et où des symboles et des rites que nous avons vidés de leur sens ont remplacé les mystères", il est encore trop courant que la vie de ces paroisses soit elle aussi un contre­-témoignage                               .

En visitant l'autre jour la merveilleuse nouvelle Cité des Sciences de la Villette à Paris, j'ai entendu un visiteur dire admirativement à sa compagne: "9a a des dimensions de cathédrale". Et cela m'a secoué car je n'ai pu m'empêcher de comparer l'animation, l'intérêt fébrile, à la limite une certaine joie qui semblaient habiter la foule immense qui s'y pressait, avec la morosité, l'ennui, une certaine tristesse qui caractérisent souvent nos assemblées.

Je ne veux certes pas faire des comparaisons faciles, mais il faut répéter à temps et  à contretemps cette phrase du père Alexandre Schmemann (Pour la vie du monde, p. 26) : "C'est seulement comme joie que le christianisme a triomphé dans le monde; et il a perdu le monde quand il a perdu la joie, quand il a cessé d'en être le témoin", et rappeler à tous l'urgence de la réforme pour que l'Eglise redevienne, dans ses communautés, lieu privilégié de la fête et de la communion                                         .

c) Sortir de notre tour d'ivoire, n'avoir pas peur de nous mouiller

La grande tentation de beaucoup de chrétiens et en particulier des orthodoxes, est de considérer que leur témoignage s'arrête aux portes de l'église ou au plus atteint leurs "prochains" proches. Certains accepteraient aussi de dire que le travail professionnel quotidien doit être une offrande à Dieu et que le chrétien - à quelque poste de responsabilité qu'il soit - est censé humaniser ses rapports avec les autres et tenter de briser la monstrueuse machine bureaucratique qui encha1ne et étouffe les hommes                                      .

Mais il en faut plus. "Toute théologie, si elle est vraiment vision de Dieu, est source d'action" (Georges Khodr). Il nous faut sortir de notre tour d'ivoire et n'avoir pas peur de nous mouiller dans des actions concrètes, non seulement pour soulager les malades et les déshérités, mais pour lutter contre la violence et l'injustice. Je n'ai pas trouvé de mots plus convaincants que ceux récemment publiés par la commission inter orthodoxe préparatoire au Grand et Saint Concile, pour nous rappeler cette exigence :                                               

"Nous, chrétiens, du fait même que nous avons eu accès au sens du salut, avons le devoir de lutter pour alléger la maladie, le malheur, l'angoisse; parce que nous avons eu accès à l'expérience de la paix, nous ne pouvons pas rester indifférents face à son absence dans la société actuelle; parce que nous avons été les bénéficiaires de la justice de Dieu, nous luttons pour une justice mieux répandue dans le monde et pour la disparition de l'oppression; parce que nous faisons l'expérience chaque jour de la divine condescendance, nous luttons contre tout fanatisme et toute intolérance entre les hommes et les peuples; parce que nous proclamons continuellement l'incarnation de Dieu et la divinisation de l'homme, nous défendons les droits de l'homme pour tous les hommes et tous les peuples; parce que nous avons reçu le don divin de la liberté grâce à !'œuvre rédemptrice du Christ, nous pouvons annoncer de manière plus complète sa valeur universelle pour tout homme et tout peuple; parce que nous sommes nourris spirituellement par le Corps et le Sang du Seigneur, nous comprenons mieux la faim et la privation, parce que nous attendons une terre et des cieux nouveaux, où régnera la justice absolue, nous combattons ici et maintenant pour la renaissance et le renouveau de l'homme et de la société" (SOP 107. 21)                            

Je n'ai rien d'autre à ajouter à ce texte lumineux qu'espérer qu'il sera entendu. Que surtout il convainque le plus grand nombre et encourage à trouver, avec d'autres hommes de bonne volonté, et dans chaque situation particulière, les moyens pratiques pour mettre en œuvre cet humble amour des hommes qu'il voudrait susciter                                                      .

Prions pour que notre Eglise soit balayée par le grand vent de la Pentecôte.  Et hâtons cette Pentecôte « renouvelée » en nous faisant nous-mêmes attentifs "à la voix de l'Esprit qui se fait entendre dans toutes les manifestations de la recherche humaine" (Georges Khodr). "Si une Pentecôte « renouvelée » est là, elle fera éclater l'écorce ancienne et assurera l'équilibre, la santé et l'ortho­-doxie de notre renouveau (ecclésial) et de notre praxis sociale" (Georges Khodr). Cette Pentecôte, si nous acceptons de nous laisser modeler par l'Esprit, nous apprendra "comment vivre dans l'Eglise en tant que fils et garder l'audace, comment préserver le mystère et en même temps le communiquer, comment introduire le monde dans le secret de Dieu… sans l'arracher à son dynamisme propre" (Georges Khodr).

Elle nous apprendra ainsi à être orthodoxes, c’est-à-dire pleinement chrétiens, ici et maintenant. N’est-ce pas là notre vocation ? Quelle grande responsabilité, mais quelle espérance encore plus grande. 

C'est le Christ lui-même qui nous interpelle, allons-nous faire la sourde oreille ? Ou, conscients de notre indignité, mais de Sa miséricorde, mettre la main à la charrue sans regarder en arrière, dans l'espoir qu'Il saura - s'Il le veut - faire de nos faces tourmentées, les icônes de Sa gloire.

Dans l'immense joie de la Résurrection, prémices de la joie sans fin du Royaume, il ne me reste pour conclure qu'à vous rappeler notre chant de victoire "Chr i s t est ressuscité des morts, par la mort il a vaincu la mort, et à ceux qui sont dans les tombeaux il a donné la vie".

Oui, en vérité  - Christ est ressuscite!

 

 

 

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